Citation:Renault Latitude : une intérimaire venue d'Asie
Par Thierry Etienne
(Envoyé spécial à Cascais, Portugal)
23/11/2010
BIEN VU - Qualités routières, bonne habitabilité, diesels éprouvés, douceur de la boîte automatique.
À REVOIR - Manque de charisme, pas de break, lacunes en termes d'aides à la conduite, tarif de la version V6. (Photos DR)
En attendant une hypothétique remplaçante de la Vel Satis, le haut de gamme Renault est assuré par une grande coréenne fabriquée par sa filiale Samsung.
Si les marques françaises ont, à leur création, rivalisé avec les meilleures étrangères sur le marché du haut de gamme, leurs ambitions dans ce domaine ont été, depuis, largement revues à la baisse. De l'aveu même de Matthieu Galipeau, chef de produit Latitude, «aujourd'hui la marque Renault ne cherche pas à se positionner en face des spécialistes allemands». Elle préfère en effet affronter ses rivaux généralistes à un niveau que les marques allemandes qualifient plus volontiers de milieu de gamme…
Après l'arrêt de la production de la Vel Satis, fin 2009, et l'annonce officielle, au plus fort de la crise, d'un doute quant à la nécessité de donner un successeur à l'Espace, Renault a laissé planer une affreuse incertitude quant à sa volonté d'investir dans le haut de gamme.
Stephen Norman, directeur du marketing et de la communication monde de la marque, se veut rassurant: «Renault veut revenir dans le haut de gamme. Tout d'abord en donnant un successeur à l'Espace. Un projet baptisé Espace Concept est en cours de développement. Il pourrait aboutir en 2014. Et d'autres projets sont à l'étude. Vous en saurez plus en février prochain, à l'annonce de notre nouveau plan produit.» 2014, c'est loin. En attendant, il fallait bien assurer l'intérim. Renault n'allait tout de même pas transporter les stars du Festival de Cannes à bord d'une Laguna.
Or, à l'autre bout du monde, la filiale Renault Samsung Motors commercialise, depuis janvier dernier, une nouvelle SM5, première Samsung conçue en collaboration avec le Technocentre Renault de Guyancourt. C'est à partir de cette grande berline classique à trois volumes que le nouveau haut de gamme Renault, baptisé Latitude, a été développé, ainsi d'ailleurs qu'une troisième version destinée aux pays du Golfe et curieusement rebadgée Safrane.
La Latitude repose sur une plate-forme de Laguna. Du moins jusqu'à l'aplomb du dossier de sa banquette. L'arrière est en effet d'origine Nissan et il abrite un train multibras. Tout en conservant l'empattement de la Laguna, la Latitude présente des cotes d'habitabilité supérieures, notamment en ce qui concerne la largeur aux coudes et la place pour les jambes à l'arrière. Avec ses 4,90 m, la Latitude apparaît comme l'une des berlines les plus longues du marché, parmi celles fabriquées par un constructeur généraliste. Extérieurement, la touche Renault est apportée par une calandre chromée.
Plus important, ses réglages de suspensions sont adaptés au goût européen. Tout en préservant le confort, les ingénieurs ont gommé une tendance à tanguer qui affecterait la SM5. Les origines asiatiques de la Latitude sont néanmoins trahies par la nature de son équipement. Quand les Européens multiplient les aides à la conduite de type alerte de changement de file, surveillance des angles morts ou régulateur de vitesse intelligent, la Latitude propose un original ionisateur d'air…
Chasse aux radars mobiles
La Latitude a fort heureusement bénéficié d'une naturalisation en bonne et due forme avec ce navigateur Carminat TomTom Live, qui, en souscrivant un abonnement à la base de données Coyotte, renseigne en temps réel le conducteur sur la présence de radars mobiles. L'écran réduit de ce GPS embarqué se retrouve perdu au milieu d'une vaste planche de bord différente de celle de la SM5. Il s'agit en fait de celle qui équipera la prochaine SM7. Les fidèles de Renault retrouveront cependant leurs marques avec une carte de démarrage mains libres, un frein de parking automatique, un limiteur-régulateur de vitesse et des commandes centralisées sur la console semblables à celles de la Laguna.
La nationalité européenne, la Latitude l'acquiert plus sûrement grâce à son offre en termes de motorisations diesels. En France, elle sera disponible, en entrée de gamme, à partir de 32.500 €, avec le dCi 150 et une boîte manuelle à 6 rapports. Ses émissions de CO2 seront alors contenues à 140 g/km, ce qui lui permettra d'intéresser certaines sociétés. À l'étage au dessus, on trouvera, dès 34.700 € en finition Business, le dCi 175 avec une boîte automatique à 6 rapports. Enfin, au sommet de la gamme, il y aura une version V6 dCi 240 équipée de la même boîte auto.
Contrairement aux versions à quatre cylindres, la V6 ne sera disponible qu'avec le niveau de finition supérieur Initiale et elle sera affichée à 45.000 €. Une coquette somme qui lui ôte toute modestie. À 46.500 €, Audi propose en effet une A6 3.0 TDI 240 Quattro Ambiente, moins équipée certes, mais très aboutie. La Latitude est-elle en mesure de soutenir la comparaison?
En adoptant des motorisations diesels et des réglages de suspensions revus et corrigés par Renault, cette coréenne se voit naturalisée européenne. Comparée à la Laguna, l'accent a été volontairement mis sur le confort.
En adoptant des motorisations diesels et des réglages de suspensions revus et corrigés par Renault, cette coréenne se voit naturalisée européenne. Comparée à la Laguna, l'accent a été volontairement mis sur le confort.
NOTRE AVIS
Passons sur le dessin dépourvu d'originalité de la carrosserie de la Latitude pour entrer directement dans le vif du sujet, la vie à bord. L'habitabilité est généreuse, digne d'une grande routière. Mais, tout est relatif, il n'y a pas autant de place pour les jambes à l'arrière que dans une Skoda Superb, la garde au toit est insuffisante.
Second constat, comparé à une Laguna dont les prétentions sont pourtant inférieures, la finition semble stagner. L'assemblage de la planche de bord est soigné mais la qualité de certains plastiques n'est pas conforme au standing de la catégorie. Celui entourant le (trop) petit écran du GPS fait vraiment bas de gamme. Cela étant, les sièges en cuir sont accueillants comme un bon vieux fauteuil club, et l'ergonomie du poste de conduite ne souffre aucune critique.
À ce niveau de gamme, on aspire à un grand confort et à beaucoup de silence. Sur ces deux points, au moins, la Latitude ne nous a pas déçus. Certes, ses mécaniques diesels grognent un peu à l'accélération mais, dès que la vitesse se stabilise, on ne les entend plus. Côté confort, malgré les grandes roues de 18 pouces montées d'office avec la finition Initiale, le filtrage des irrégularités de la route s'avère excellent. Pour trouver mieux, il faut se tourner vers des rivales équipées d'un amortissement pneumatique. Prévenante à l'égard de ses passagers, la Latitude n'en est pas moins précise et efficace sur routes sinueuses. Les retouches apportées aux réglages du châssis par Renault portent leurs fruits.
La douceur de la boîte automatique participe également au confort de conduite. Elle seconde des moteurs Diesel, à 4 et 6 cylindres, souples et économiques. La Latitude V6 dCi 240 n'a réclamé que 8,2 l/100 km durant notre essai. Et sa consommation pourrait encore être diminué esi elle était équipée, comme la plupart de ses rivales, d'un système de coupure du moteur à l'arrêt de type stop & start. Enfin, lorsque les fidèles de la marque découvriront que le nouveau haut de gamme Renault est dépourvu de hayon, ils regretteront sans doute qu'il ne soit pas proposé en break.
REVUE DE DETAILS
Coffre - Sans hayon - Renault, qui fut le premier à oser la cinquième porte en haut de gamme, opte ici pour une ouverture classique. Cette malle coréenne peut contenir quatre sacs de golf. Son volume ressort à 477 l, guère plus que celui de la Laguna, mais avec une roue de secours sous le plancher. La banquette est rabattable en deux parties pour loger des objets encombrants.
Confort - Massage compris - À bord de la Latitude V6, le conducteur peut se faire masser en roulant. Cinq tubes pneumatiques intégrés dans le dossier du siège offrent jusqu'à quatre types de massage : continu ou aléatoire, intensité douce ou énergique. Cet équipement fait partie de la dotation de série des versions Initiales. Sinon, il figure au rang des options.
Équipements - Renault a équipé sa grande berline d'un ioniseur d'air qui fonctionne selon deux modes. Un mode Clean pour assainir l'atmosphère en neutralisant bactéries, allergène et microbes. Et un mode Relax censé déstresser les passagers en rétablissant l'équilibre électromagnétique entre les ions positifs et négatifs. L'histoire ne dit pas si cela permet de rester zen dans les embouteillages…
TROIS CONCURRENTES
CITROËN C5, Exclusive - Sa deuxième génération, est construite suivant le modèle allemand. Mais son confort, hydropneumatique oblige, est supérieur à celui de la Latitude. Elle est disponible en break, ainsi qu'avec un V6 HDI, à peine plus cher que le 4-cylindres dCi Renault.
Moteur : 4 cyl. et V6 HDi
Puissance : 160 et 240 ch
Conso. (CO2) : 6,8 et7,2 l (179 et 189 g)
Longueur : 4 780 mm
0-100 KM/H : 10 et 7,9 s
Prix : 34.450 et 40.950 €
OPEL INSIGNIA, Cosmo - Un constructeur généraliste peut rencontrer le succès en haut de gamme, la preuve avec cette Opel séduisante et bien conçue. Le haut de gamme diesel est en outre disponible en 4 × 4 et en break à un tarif abordable. Il n'y a pas de V6 Diesel.
Moteur : 2.0 CDTi 160 auto
Puissance : 160 ch
Conso. (CO2) : 6,0 l (159 g/km)
Longueur : 4 830 mm
0-100 KM/H : 9,6 s
Prix : 33.750 €
SKODA SUPERB, Praha - Les places arrière sont ici dignes d'une limousine. Une limousine low-cost car la technologie VW, dont la boîte DSG, est disponible à bon compte. Le hayon à double ouverture est pratique. Il existe aussi un break, mais pas de V6 diesel.
Moteur : 2.0 TDI 170 DSG
Puissance : 170 ch
Conso. (CO2) : 6,0 l (157 g/km)
Longueur : 4 840 mm
0-100 KM/H : 8,8 s
Prix : 36.160 €