Hybrides : Toyota temporise avant de lancer son offensive en Europe
[ 12/09/07 ]
Le contexte politique européen sur les futures émissions de CO2 est trop flou aujourd'hui pour que Toyota lance une nouvelle phase de développement de sa gamme de motorisations « vertes ».
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL À FRANCFORT.
L'inventeur de la Prius a beau avoir plein de projets dans ses cartons en matière de véhicules hybrides, le contexte politique et industriel européen l'incite à temporiser avant de lancer un plus grand déploiement de son offre « verte ». « Si le marché continue à se développer, nous prévoirons un élargissement de la gamme. Mais actuellement, il est trop tôt pour passer à cette phase, explique aux « Echos » Thierry Dombreval, senior vice-président de Toyota Europe, en charge des ventes et du marketing. Nous avons besoin d'abord de bien comprendre la réglementation sur le CO2 au-delà de l'objectif des 140 grammes par kilomètre. Début 2009, après différents allers-retours entre la Commission et le Parlement, nous devrions y voir un peu plus clair. »
Pour le moment, en matière d'hybrides, le numéro un mondial propose en Europe uniquement sa Prius, dont il compte vendre cette année 44.500 unités sur un total de 1,2 million de véhicules (Russie comprise), et trois versions onéreuses de sa gamme Lexus (RX, GS et LS). Son concurrent Honda promet de distribuer quant à lui trois modèles supplémentaires, mais il met en oeuvre une technologie moins complexe dite « mild hybrid ».
La Commission européenne souhaite imposer aux constructeurs une nouvelle baisse drastique de leurs émissions de dioxyde de carbone (120 grammes par kilomètre en moyenne dès 2012), mais le débat fait rage sur la manière d'y parvenir et surtout de mesurer les émissions respectives. Une idée qui fait son chemin à Bruxelles, appuyée par les grands constructeurs allemands, serait de créer des classes de véhicules en fonction de leur poids. La deuxième option consisterait à tenir compte de la surface au sol (longueur multipliée par la largeur du véhicule). Autre possibilité : panacher les deux premières solutions. Le souhait des constructeurs français d'imposer une limite unique à tout le monde paraît avoir du plomb dans l'aile, comme tend à le prouver le discours évasif de Carlos Ghosn, le patron de Renault, qui se refuse à semer la zizanie entre constructeurs européens.
Le paysage européen est rendu encore plus mouvant et incertain, aux yeux de Toyota, par les différences notables en matière d'incitations fiscales sur les véhicules propres. Seuls quelques pays (France, Espagne, Pays-Bas) ont déployé des incitations partielles à l'achat d'hybrides. Pas de quoi se précipiter donc, malgré l'image positive qu'apporte la Prius à Toyota. D'autant que son programme vedette ne gagne pas encore d'argent, et que le marché européen est loin d'avoir la masse critique suffisante pour justifier une usine locale consacrée à la Prius. De plus, la Prius de nouvelle génération est encore en préparation, suscitant nombre de questions sur les performances et les capacités de sa future batterie.
Mis à part Honda, et le français PSA qui travaille sur des modèles hybrides avec moteurs Diesel pour 2010, ce segment « vert » laisse de marbre la plupart des concurrents européens. « Si l'on faisait quelque chose en matière de voiture propre, ce serait plutôt un modèle électrique », estime Carlos Ghosn. Quant à l'hybride Diesel préconisé par son concurrent tricolore, il ne croit guère à son équation économique : « le diesel est un surcoût pour le client, l'hybride un autre surcoût. Avec cela, vous avez donc des surcoûts au carré », ironise-t-il. Le patron de GM Europe, Karl-Peter Forster, considère pour sa part qu'« il n'y a pas de marché pour l'hybride en Europe ».
http://www.lesechos.fr/info/auto/300208146.htm