Renault songe à lancer une gamme «premium»
Carlos Tavares s’inspire du succès de la gamme DS de son concurrent Citroën. Pour redorer le blason de la marque au losange, il pourrait exhumer le label Alpine, Baccara ou Initiale.
Quelques semaines après son arrivée au poste de directeur général des opérations de Renault, Carlos Tavares a conscience que l’image du losange s’est brouillée. La faute à l’absence de nouveau modèle marquant et à une communication vouée à la seule voiture électrique sous le règne de son prédécesseur, Patrick Pelata. Le nouveau patron sait qu’il lui faudra redéfinir la culture de la marque qui a inventé les R4, R16, Twingo, R5 et Clio. Un vaste programme, qui ne réclamera pas toujours l’aval de Carlos Ghosn.
«S’il me vient l’envie de créer une nouvelle marque, je verrai naturellement avec lui, assure Carlos Tavares. Pour une carrosserie ou un moteur, non. Renault s’est fixé pour règle de ne pas consacrer aux investissements plus de 9% de son chiffre d’affaires. Naturellement, il peut y avoir à l’intérieur de cette enveloppe débat sur l’affectation des dépenses. Le plan produit est validé une fois par an. Le programme de la voiture électrique ne sera pas remis en cause, juste sa vitesse de déploiement en fonction des circonstances. Déjà, nous disposons d’une gamme complète de 4 modèles électriques et nous sommes les seuls à le faire pour le moment.»
Tout de même soucieux que les aides gouvernementales promises à la voiture électrique ne soient pas remises en cause par une possible crise, Carlos Tavares assure que «l’électrique n’est pas un pari. C’est une assurance sur l’avenir, dans un contexte de ressource pétrolière qui sera de plus en plus difficile. C’est une façon de protéger l’entreprise d’un retournement de conjoncture. Cela donne, de plus, l’occasion à Renault d’être leader. Notre exposition à l’électrique reste encore mesurée, puisqu’elle représente 10% des quarante modèles que Renault commercialise.» La voiture thermique conserve donc toute son importance et Carlos Tavares ne se renie pas lorsqu’il songe à élargir le champ d’action de Renault.
À une nouvelle marque? «En aucun cas, répond le patron, car Renault doit rester Renault. Nos équipes sont ainsi en train de clarifier les rôles respectifs de Renault et de Dacia. Mais il faut aussi se développer sur le haut de gamme, en profiter pour valoriser nos compétences et mieux exploiter les retombées de nos succès en Formule 1. Nous voulons augmenter la valeur de reprise des Renault, qui n’est pas aussi bonne que celle de Volkswagen, alors que notre fiabilité, démontrée par les enquêtes, est au moins comparable, y compris en Allemagne. Un label qui serait à la fois sportif et luxueux pourrait signaler cette gamme spécifique. Alpine, comme d’autres propositions, fait partie des noms à l’étude. Nous travaillo ns actuellement sur plusieurs modèles mais la décision n’est pas encore actée.»
«Un label prestigieux»
L’exemple de Citroën a fait son chemin. Avec sa gamme DS lancée à l’automne 2009, le constructeur a déjà engrangé 100.000 ventes de DS3 et 15.000 commandes de DS4. Le signe annonciateur serait le moteur Renault Sport Technologies, rebaptisé Renault Alpine? «Pourquoi pas répond en souriant Carlos Tavares, c’est un label connu et prestigieux», une identité qu’il préférerait à Initiale ou Baccara aux relents trop marketing.
À la différence des DS Citroën qui enjolivent des plates-formes de grande série (C3, C4, etc), certaines Renault Premium se doteraient de moyens très ambitieux, afin de rivaliser avec les références allemandes sur les marchés qui en sont friands, chinois et américain notamment.
Les ressources technologiques sont toutes trouvées avec Infiniti, la ligne luxueuse de Nissan, conçue d’abord pour les États-Unis. «Nous avons, avec Infiniti, les châssis très évolués à propulsion, quatre roues motrices, des moteurs brillants, l’hybridation et même le diesel qui manquait jusqu’ici», avoue avec une gourmandise non feinte Carlos Tavares.
Ainsi se dessine le futur haut de gamme Renault qui, sur une base raffinée, donnera lieu un jour à d’autres carrosseries au losange, imaginées par Laurens Van den Acker. Le patron du design a reçu carte blanche pour ses créations.
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