Renault dépasse les 3 milliards de perte
Encore bénéficiaire l'an dernier, le constructeur automobile français a sombré dans le rouge encore plus profondément que son concurrent PSA. Il affiche néanmoins un cash flow positif qu'il entend maintenir en 2010.
Même cause, mais effets pire encore. Après PSA qui, blâmant la crise, a fait état mardi d'une perte nette de 1,2 milliard d'euros pour l'année 2009, le constructeur automobile français Renault a ce jeudi, publié des comptes trois fois plus déficitaires.
Le groupe présidé par Carlos Ghosn a en effet accusé une perte nette part du groupe de 3,125 milliards d'euros pour l'exercice écoulé. Cela, alors qu'à la différence de son concurrent , il affichait encore en 2008 un bénéfice (de 571 millions d'euros).
En cause évidemment la crise, qui en faisant chuter les ventes d'automobiles, a lourdement affecté toutes les entreprises du secteur et particulièrement celles entretenant des liens capitalistiques avec le constructeur français. Ensemble, le japonais Nissan , le suédois Volvo AB et le russe Avtovaz (détenu à 25% par le français) lui ont fait perdre un total de 1,561 milliard, soit plus de la moitié de sa perte nette. Cela alors qu'en 2008 la contribution de ces trois constructeurs avaient gonflé les résultats du groupe Renault de 437 millions (dont 345 millions pour le seul Nissan).
Deux milliards de trésorerie
Les synergies générées par l'Alliance avec Nissan ont été "un levier important dans le succès du plan free cash flow de Renault 2009", a cependant fait valoir le groupe français en se félicitant d'avoir rempli son ''objectif prioritaire" pour l'exercice, à savoir dégager un free cash flow positif, avec au final un flux de trésorerie disponible de 2,088 milliards. Du coup, autre point positif : l'endettement de la branche automobile a fondu d'autant, même s'il reste encore élevé à 5,9 milliards en fin d'année.
Pour remplir cet objectif, Renault s'était engagé à optimiser ses revenus, réduire ses coûts (y compris d'investissement) ainsi qu'à gérer de façon très stricte son besoin en fonds de roulement, a-t-il rappelé.
De fait, en matière de réduction des coûts, le groupe est parvenu à diminuer de 17% ces coûts fixes par rapport à 2008. Mais cette diminution s'est effectuée en rognant bien davantage sur ses frais de R&D (26% sur un an) et ses investissements nets (-30%) que sur ses coûts fixes industriels (-3%) et ses frais généraux (-8%), grâce notamment pour ces derniers, au départ de quelque 7.000 de ses collaborateurs (dont 6.000 en Europe dans le cadre d'un plan de départs volontaires. Sur les trois dernières années; les frais généraux du groupe ont néanmoins baissé de quelque 20%, a souligné le groupe.
Son besoin en fonds de roulement a lui profité d'une nette réduction des stocks.
Côté revenus en revanche, malgré une second semestre soutenu par les primes à la casse, le groupe a cependant dû accuser une baisse de 10,8% sur un an, à 33,712 milliards d'euros. Mais à cet égard rien de surprenant pour les investisseurs qui manifestaient néanmoins très clairement leur déception sur le titre Renault à la Bourse de Paris. Dès décembre, le directeur général du groupe Patrick Pelata, avait préparé le terrain, en annonçant qu'il anticipait une baisse de " l'ordre de 17à 18%" dudit chiffre d'affaires par rapport à son de niveau de 2007. Ce qui rapporté au niveau de 2008, laissait bien anticiper une baisse de 10%.
Et au final, le résultat d'exploitation du groupe s'affiche en négatif (-396 millions au lieu de 326 en 2008) avec une marge opérationnelle en recul de 2,1 points sur un an à, -1,2% du chiffre d'affaires (contre 0,9% en 2008).
Nouvelles réductions d'effectifs
Pour 2010, dans un environnement qui s'annonce "particulièrement obscure pour l'industrie",, Carlos Ghosn, se fait donc fort de poursuivre ses efforts de réduction des coûts, via notamment de nouvelles réduction des effectifs par départs naturels. Le groupe qui employait 121.000 personnes à fin 2009, anticipe ainsi un millier de départs supplémentaires dans le monde.
En dépit des difficultés qui s'annoncent sur le marché automobile, il compte aussi sur une amélioration de ses performances commerciales sous forme d'augmentation de sa part de marché, s'estimant aidé en cela par la poursuite du renouvellement de sa gamme. Après les lancements des Megane, Scenic, Samsung SM3 et Dacia Sandero en 2009, l'offre du groupe s'enrichira cette année de six nouveaux véhicules.
Dès le printemps devrait ainsi être commercialisé sous la marque Dacia, un 4x4 low cost baptisé Duster. Sous la marque Renault, apparaîtront aussi deux coupé-cabriolets qui seront dévoilés au prochain salon de Genève, en mars, l'un sur la base Twingo, baptisé Wind. L'autre viendra étoffer la gamme moyenne Megane en s'ajoutant à la berline et à sa déclinaison monospace Scenic.
Mais le défi risque d'être difficile à relever. Car si, selon les prévisions du constructeur, le marché mondial automobile pourrait connaître une croissance de 3%. Cette croissance s'effectuera essentiellement en Chine, en Inde, en Amérique du Nord, l'Inde et en Russie. Des pays où la présence du groupe est nettement moins affirmée qu'en Europe et dans le bassin méditerranéen, deux zones dans lesquelles en revanche les ventes d'automobiles devraient baisser de 10%, selon Carlos Ghosn, faute de reconduite des primes à la casse dans nombre de pays.
S'agissant de l'évolution des marchés d'Europe de l'Est en particulier, l'interrogation reste semble t-il entière : les ventes de véhicules pourraient y redémarrer plus vite que prévu mais elles pourraient aussi être plus affectées par l'arrêt des primes en Europe de l'Ouest, reconnaît Ghosn.
Face à de telles incertitudes, l'attention principale du patron de Renault reste donc plus que jamais concentrée sur la réduction de l'endettement de son groupe. Prudent, il se contente toutefois en guise d'objectif du même leikmotiv qu'en 2009 : un cash flow positif. Seule précision : la recherche de nouvelles synergies au sein de l'alliance avec Nissan, devrait contribuer à gagner 1 milliard d'euros supplémentaires, après avoir rapporté 1,5 milliard en 2009. Quant à la réduction des stocks, elle sera elle aussi poursuivie pour diminuer le besoin en fond de roulement.
De quoi assainir la situation avant la mise en place par Carlos Ghosn d'un nouveau plan stratégique à moyen terme, prévu en début d'année prochaine et dans une optique sans aucun doute plus pérenne que le précédent plan - Renault Contrat 2009 - lancé en 2006 mais finalement abandonné en 2008 à l'arrivée de la crise économique.
ARIELLE GONCALVES, Les Echos
www.lesechos.fr/info/auto/300409964-renault-depass..lliards-de-perte.htm