L'électrique de la Silicon
La naissance d'un nouveau constructeur est toujours un évènement, et c'est encore plus vrai quand il s'agit d'un constructeur de voitures électriques. C'est le projet de deux entrepreneurs de la Silicon Valley, Martin Eberhard et Marc Tarpenning. Pour le mener à bien, ils sont parvenus à lever plus de 60 millions de dollars auprès d'investisseurs très en vue comme Elon Musk, l'un des fondateurs de Paypal, ou Larry Page et Sergey Brin, les fondateurs de Google. Il faut être doué, mais il faut aussi avoir de la chance. L'entreprise s'appelle Tesla Motors, mais plus que par la technique, c'est par son business-plan que ce constructeur se distingue.
Le but de l'entreprise est de vendre des voitures aux américains. Pour que cela soit bien clair et net, ils l'ont écrit dans la FAQ de leur site : « We will not sell a Tesla Roadster to anyone outside of the continental US ». Pas la peine de demander, il n'y aura rien pour les étrangers. Côté production, ce n'est pas mal non plus, puisque la société Tesla Motors ne produira rien, achètera tout, et sous-traitera même l'assemblage final de l'auto au fabricant anglais Lotus. Celui-ci a une bonne pratique de la petite série, mais il est faux de penser que cette Tesla est une Elise électrifiée. Ce roadster Tesla est bien plus gros (3.95 x 1.87 x 1.12 m). Il est vrai par contre que toute deux ont une structure en aluminium de construction similaire.
La conception est cependant totalement différente, puisque la structure de la Tesla doit accomoder un petit moteur électrique (seulement 70 kg), mais un gros pack de batteries. Le moteur est puissant, 185 kW à 13 500 tr/mn (251 ch), et c'est une boite à 2 rapports qui transmet sa puissance aux roues arrières. La première monte à 100 km/h, et la seconde à un peu plus de 200 km/h. L'accélération de 0 à 100 km/h est donné pour environ 4 secondes, mais nous précisons que ce chiffre est une estimation. Il ne semble pas que les performances de l'auto aient déjà été mesuré. Autre précision, si la voiture est présentée en juillet 2006, il faudra attendre une année de plus pour que les premiers clients soient livrés. Il y a encore beaucoup de choses à finaliser.
La voiture présentée a néanmoins un aspect appréciable de produit fini, et abouti, avec l'air conditionné, un verrouillage centralisé, des sièges chauffants, 2 airbags, un système de contrôle de la pression des pneumatiques, des vitres latérales électriques, un toit souple en série, et un hardtop en option. Ils ont travaillé plus de 3 ans, avant de montrer la voiture, et cela se voit. Le souci du détail se constate en de nombreux éléments qui ont été marqués, estampillés, ou gravés du nom du constructeur, par exemple ci-dessous le moteur. Mais il y a aussi les relais électriques. Nous le signalons, car en même temps que cela témoigne de la volonté des concepteurs de l'auto de faire un bel objet, cela signifie aussi qu'ils n'ont pas cherché à rogner les coûts à tout prix.
Parce que le roadster Tesla sera une voiture chère. Le prix n'est pas encore fixé, mais on ne l'attend guère en-dessous de 100 000 $, ce qui est finalement raisonnable, car la voiture intègre plus de 400 kg de batteries Lithium-Ion ! Le constructeur indique qu'elles doivent tenir 500 cycles, et ce serait des batteries chinoises. 6 831 petites batteries (cellules) montées les unes à côté des autres, pour former un pack unique, mais toutes gérées individuellement, par un contrôleur avec une grande capacité de calcul. Dommage cependant, le constructeur n'indique pas la capacité de ce pack, il n'en donne pas non plus le poids exact, et ni celui de l'auto. On suppose que ce sera révélé quand l'auto sera effectivement commercialisée.
Mais ce que le constructeur indique déjà, avec fierté, c'est l'autonomie, qui serait entre 320 et 400 km. Ce qui avec les 500 cycles permis, permettraient de faire plus de 160.000 km avec le même jeu de batteries, c'est excellent. Pour recharger, Tesla indique un temps minimal de 3 heures et demie, et il est évident que ce n'est pas sur une prise 16 A classique. La voiture sera livrée avec un système de charge dédié, à faire installer dans son garage par un électricien compétent, et qui consiste essentiellement en la pose d'une prise 70 ampères. Mais cela oblige à ravitailler toujours au même endroit (!), chez soi, et si le client veut pouvoir ravitailler à partir de n'importe quelle prise de courant, il faut recourir à une option. L'option consiste en un boitier embarqué affublé de plusieurs prises, pour pouvoir se brancher aussi bien sur du 220 que du 110 V, encore largement en usage aux USA. Reste qu'en 110 V 8 A, il faudra plus de 24 heures de charge...
Proposition intéressante, Tesla a noué des accords de partenariat avec des installateurs de panneaux solaires. Alors pour celui qui a le budget, et la place pour installer plus de 50 m2 de capteurs, il est possible de balancer la consommation d'électricité de son auto par sa production domestique, qui est renvoyée vers le réseau quand l'auto ne charge pas. Zéro pollution à l'utilisation, et zéro pollution à la production de l'énergie, c'est la recette miracle, mais ce n'est pourtant pas cela que le constructeur choisit de mettre en avant. Le grand atout de ce roadster Tesla serait en effet : son agrément d'utilisation.
C'est cela que Tesla met en avant, parce que cette auto est une vraie voiture de sport, avec toutes les joies de la traction électrique (couple immédiat, très grande plage de régimes utilisables, silence de fonctionnement), avec le plaisir de la puissance, et la jouissance d'une autonomie correcte. Nous sommes d'accord, mais une chose nous chagrine pourtant. Elle est que pour une auto qui porte le nom de Tesla, de Nikola Tesla, le génial inventeur, le grand Maître du courant alternatif, cette voiture n'a pas grand chose d'innovant. Toutes les caractéristiques du roadster Tesla sont en effet semblables à celles de la Venturi Fetish.
La voiture américaine promet d'être beaucoup moins chère que la monégasque, voilà un atout. Mais il s'explique par un volume de production qu'on prévoit plus important, et une structure en panneaux d'aluminium, quand la Venturi a une coque en fibre de carbone. Il y a aussi les batteries, mais nous pensons que le prix de la Venturi va baisser avec des batteries moins chères, comme celles de la Tesla (mais de qualité égale ?). Le constructeur fait d'ailleurs quelque chose d'inédit pour un constructeur auto, il donne le rendement de ses batteries : 86 %. Bravo ! Mais par le sérieux de sa réalisation, et le professionnalisme des gens qui pilotent le projet, plutôt que de nous extasier devant l'auto, nous préférons applaudir devant les implications politiques : la voiture électrique que certains croyaient enterrée, est en train de renaitre.
source = moteur nature