Carlos Ghosn fustige le rapprochement entre Nissan et Honda
Dans une interview donnée en visioconférence à Auto-Moto depuis le Liban, un pays qu’il ne peut pas quitter sous peine d’être arrêté, l’ex-PDG de Nissan s’est dit “absolument pas convaincu que Nissan dispose des talents nécessaires pour relever les défis auxquels il est confronté”.
Nissan en “mode panique” selon Carlos Ghosn
Si l’ancien homme fort de Renault et Nissan est généralement peu loquace vis-à-vis de Renault de l'action de Luca de Meo, en revanche, il n’hésite pas à taper sur Nissan. Vengeance, aigreur envers la société qui l’a fait enfermer ou simple raisonnement de bon sens de celui qui connait bien Nissan de l’intérieur, difficile à dire et chacun fera son propre jugement.
Malgré tout, on peut lui reconnaitre une chose : il a souvent eu le bon diagnostic. On se rappelle notamment son indignation quand, en 2015, il avait clamé haut et fort le risque d’un démantèlement de l’Alliance, et une gestion compliquée de la susceptibilité du clan nippon suite à la décision du ministre de l’Économie de l’époque, Emmanuel Macron, de donner plus de pouvoir à l’État dans la gestion de certaines grandes entreprises comme Renault.
Après être devenu N°1 mondial en 2017 avec 10,6 millions de véhicules légers immatriculés, Carlos Ghosn a quitté son poste de PDG de Nissan, tout en restant au conseil d’administration, non sans critiquer le président qui lui avait succédé. Et depuis son arrestation fin 2018, Nissan n’a pas cessé de dégringoler. Une chute qui est selon lui le résultat de mauvaises décisions, jusqu’à cette potentielle fusion avec Honda. Un rapprochement qui est selon lui contre-nature, par manque de complémentarité.
“D’un point de vue industriel, il y a des doublons partout. Cela n’a pas de sens. Si cette fusion a lieu, je ne pense pas qu’elle sera couronnée de succès.»
Nissan poussé par le gouvernement japonais dans les bras de son ennemi de toujours ?
Selon lui, Nissan agit en mode panique “suppliant son ennemi de toujours”. Un avis qui a du sens puisque le désormais troisième constructeur japonais a entamé son plan de suppression de 9 000 postes dans le monde après des résultats financiers exécrables lors du dernier trimestre. Selon lui, cette alliance serait une prise de contrôle déguisée d'Honda sur Nissan alors que le constructeur serait proche de la banqueroute…
Devant la situation, le gouvernement japonais, toujours très protectionniste, serait d’ailleurs à la baguette pour éviter qu’une marque étrangère ne s’empare de Nissan comme avait pu le faire Renault peu avant les années 2000. Pourtant, les meilleures années de Nissan sont celles de l’époque Renault, avec un point d’apogée en 2017.
La suite, on la connait. Nissan appuie sur le bouton pour faire “sauter” Carlos Ghosn. Ce dernier est arrêté fin 2018 au Japon alors qu’il tentait une fusion entre Nissan et Renault. Cette date marque le début de très fortes tensions entre Renault et Nissan, poussant le constructeur français à se séparer de 28,4% de ses actions, et limiter son actionnariat “actif” à seulement 15% contre plus de 43% jusqu’alors. Une partie a d’ailleurs déjà été revendue via trois sessions (5% le 13 décembre 2023, 2.5% le 28 mars 2024 ainsi que 5% le 26 septembre dernier).
Libéré de Renault, Nissan se retrouve pourtant désormais dans une situation très compliquée… Dans le clan français, ça doit rire… jaune. Car avec encore près de 15% du capital de Nissan en sa possession, et un peu plus de 20% en la possession d’une fiducie française, la mauvaise santé de son ex allié impacte directement la marque française, alors que de son côté tout semble aller pour le mieux que ce soit du côté des ventes ou des résultats financiers.