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Elisabeth Borne favorable au 110 km/h sur autoroute

Récemment désignée première ministre du gouvernement d’Emmanuel Macron, Elisabeth Borne cache à moitié sa volonté concernant l’abaissement de la limitation de vitesse à 110 km/h sur autoroute. Qu’en serait-il si cette mesure devenait effective ?
Elisabeth Borne favorable au 110 km/h sur autoroute
Par le 27/05/2022

À peine proclamée première ministre qu’Elisabeth Borne change déjà de discours d’un moment à un autre. Celle qui a toujours été pour un abaissement de la limitation de vitesse sur autoroute à 110 km/h a pourtant déclaré en fin de semaine dernière sur le JT de TF1 que « ses propos avaient été déformés ». 

Jusque là ouvertement favorable à cette mesure, la nouvelle première ministre risque de se mettre une partie des usagers de la route à dos, puisque une mesure similaire avait été tentée il y a quelques mois avec l’abaissement de la limite de vitesse de 90 à 80 km/h sur les axes secondaires. Rappelons que certaines portions sont repassées par la suite à 90 km/h, une légère preuve d’inefficacité puisque le nombre de morts sur les routes stagnent depuis 2013. Mais alors, pourquoi diminuer sa vitesse à 110 km/h sur autoroute, soit l'actuelle vitesse autorisée par temps de pluie ? Quels sont les arguments en faveur de cette mesure ? 

L’argument du climat, point important du nouveau quinquennat 

vers un possible passage à 100 km/h sur autoroute en France

Évidemment, il faut bien trouver une liste d’arguments pour faire comprendre aux automobilistes que vous ne devez plus rouler et prendre votre véhicule. Ainsi, le gouvernement espère faire diminuer les émissions de CO2 avec cette mesure. 

Si beaucoup évoquent une baisse de la consommation de l’ordre de 5% en diminuant sa vitesse maximale autorisée sur autoroute de 20 km/h, cela est principalement le cas pour les « anciens modèles ». En effet, déjà fortement contraints par les normes, les constructeurs s’efforcent de produire des véhicules toujours plus économiques, à l’image d’une Clio E-Tech hybride qui affiche une consommation de 4,3 l/100 km. On est loin des 6 ou 7 litres au 100 (en cycle mixte) des modèles des années 2000, encore nombreux sur les routes en raison des prix excessivement chers des nouveaux véhicules. 

De plus, avec l’expansion des véhicules électriques en France, l’argument de la consommation perd en crédibilité. Même si le pourcentage de véhicules 100 % électrique reste encore peu élevé en France (à peine plus de 10 %), on ne peut pas nier le fait que cette énergie est certainement l’avenir de la mobilité. Alors en électrique sur autoroute, le seul impact est de voir son niveau de batterie fondre à vue d'œil, comme nous avons pu le constater lors de notre essai Paris-Lyon en Mégane E-Tech. À noter que la ville de Lyon a accueilli le mois dernier un salon automobile. Pour le coup, autant être honnête et dire que cet abaissement de la limitation de vitesse sur autoroute peut être bénéfique pour les véhicules électriques. 

Mais une fois de plus, et comme pour beaucoup de sujets aujourd’hui, dès lors que l’on apporte des chiffres évoquant une possible diminution des émissions de CO2 - et bizarrement cela est encore plus pris à cœur quand on parle d’automobile - alors il faut immédiatement appliquer cette solution pour la planète. Certes, cette dernière est en danger, cela n’est pas nouveau, mais oui nous allons répéter une phrase que tout le monde a déjà entendu et qui est vraie : qu’en est-il des vols aériens de certaines compagnies, ou jet privés, qui polluent 45 fois plus qu’un voyage en voiture… Demandons la réponse à notre ancien premier ministre Jean Castex, qui a tout simplement fait un aller-retour en jet privé pour... aller voter, rien que ça !

Et que dire des croisières en bateau, qui restent le transport le plus polluant, n'ont pas qu'un objectif de transport, mais aussi de plaisir en pleine mer, alors que la même chose peut être réalisée à terre.... 

Bref, au niveau du portefeuille en tout cas, puisqu’il faut bien trouver des points positifs, cette réduction de la vitesse peut faire gagner quelques petits euros sur un plein d’essence (en raison, il est vrai, d’une faible réduction de la consommation) qui coûte toujours plus cher : 80 euros pour une petite citadine, et plus de 100 euros pour des berlines… Eh oui, rouler est devenu un luxe aujourd’hui. 

L’argument des accidents et de la mortalité … qui stagne depuis bientôt 10 ans maintenant 

Certes plus spectaculaires parfois, les accidents mortels sont beaucoup moins nombreux que sur les seconds axes

Autre point visant à responsabiliser les usagers de la route, appuyer sur la mortalité routière en France. Mais là encore, en regardant simplement les chiffres annuels depuis 2013, on se rend compte que le taux ne baisse pas et qu’il reste au même stade, même après expérimentation de la limite de vitesse maximale à 80 km/h. Difficile donc de prôner une telle mesure avec cet argument. 

Il n’y a qu’à regarder ce qui se passe chez nos voisins allemands (oui la comparaison est nécessaire). Certains axes offrent la possibilité de rouler sans limitation sur la voie la plus à gauche, et le nombre d’accidents est bien moins élevé qu’en France. Une explication ? Peut-être que les automobilistes allemands sont plus responsables et mieux éduqués en termes de conduite que nous. 

Champion pour râler, encore plus au volant, le Français n’est pas toujours très civilisé sur les routes. Entre le fait de circuler téléphone au volant, sur la voie de gauche alors que celles de droite sont libres, 20 km/h en dessous de la vitesse maximale autorisée, ce sont plutôt ces raisons qui peuvent provoquer des accidents. 

Rappelons que l’autoroute est aussi le réseau le plus sécurisé et le moins mortel en France, si l’on compare avec les départementales toutes défoncées sur notre territoire. Les chiffres en sont la preuve, en 2020, le nombre de tués sur autoroute était de 201, contre près de 1 500 sur les départementales et nationales, soit environ 7 fois plus. Le constat est sans appel une fois de plus. 

Et si le gouvernement voulait encore un peu plus remplir ses caisses ?

Payer toujours plus pour rouler toujours moins

Dernière hypothèse, la rentabilité. Et ce n’est pas les dernières informations en matière de « sécurité routière » qui diront le contraire. Il y a quelques jours, nous vous parlions des nouveaux panneaux de signalisation, ou plutôt de l’absence de signalisation des radars en France. Jumelé à la réduction de la vitesse, ne sentez-vous pas venir le piège ? Pourtant, les volontés se contredisent, avec la possible fin de la perte de points pour les "petits excès" de vitesse...On ne sait plus où donner de la tête. 

Avec des véhicules toujours plus puissants mais surtout toujours plus rassurants, rouler à 130 aujourd’hui en devient presque ennuyeux, dans le sens où vous avez l’impression d’être à 50. Qu’on se le dise, nous ne sommes plus dans le temps des R5 (cette dernière qui vient d'ailleurs d'être déclinée en version électrique revisitée pour ses 50 ans) qui tremblaient de tous les côtés une fois dépassés les 100 km/h. Avec la démocratisation des SUV (même s'il reste important de préciser le fait que rouler en SUV ne vous rend pas invincible) en France, circuler à 130, même 150, n’est pas beaucoup plus dangereux que l’automobiliste au téléphone au volant, sous l’emprise de l’alcool, ou qui va dépasser un camion à 92 km/h alors que la vitesse est limitée à 130…

Dernier point à préciser, comment justifier désormais la hausse des tarifs des péages ? Déjà remis en cause en raison des kilomètres de travaux rencontrés sur ces axes, l’incompréhension prendra encore plus d'ampleur si les prix continuent d'augmenter alors que la limitation de vitesse elle, diminue. N'oublions pas que le principe de l'autoroute est tout de même de se rendre d'un point A à un point B plus rapidement et de manière plus sécurisée que sur les seconds axes, plus mortels que l'autoroute. 

Si l’avis peut ne pas être partagé par tous, ce qui est compréhensible, relevons que la politique concernant le secteur de l’automobile est plus restrictive que préventive. Depuis l’apparition du Covid, le secteur est en grande difficulté et rien n’est fait pour l’aider à sortir la tête de l’eau. 

Ce n’est pas grave, hâte de se retrouver bloqué chez soi les grands week-ends et départ en vacances en raison d’une trop forte affluence, ou d'une énième grève, sur les lignes de la SNCF ou les vols Air France...

D’autres restrictions arriveront sans aucun doute dans les prochains mois, et nous aurons le plaisir de vous les faire partager, ainsi que notre ressenti par la même occasion. 

Usagers Français, bon voyage sur nos routes, et surtout, entraînez vous à garder un œil à la fois sur le tableau de bord et sur la chaussée, le danger est PARTOUT, mais surtout sur les routes apparemment !

MAJ novembre 2022: le gouvernement a écarté l'idée d'une réduction de la vitesse à 110 km/h.


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