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8. La crise du pétrole fait vaciller Renault (1972 - 1980)

Une période tumultueuse arrive en France. Alors que l'on sort de Mai 68, la crise du pétrole et le chômage durable s'installe. L'industrie est ainsi touchée de plein fouet par ces évènements, et Renault n'y échappe bien sur pas.
Par le 23/06/2002 Dernière mise à jour le 08/04/2021

En 1972, l'image de Renault en France va fortement se rajeunir. Pour faire passer le message, la marque inaugure un nouveau logo, moderne et brillant dessiné par Vasarely. Il est inauguré sur un tout nouveau modèle ludique et plaisant: la R5.

Avec sa "bonne petite bouille", cette nouvelle voiture 3 portes va tout de suite s'imposer. La version 5 portes n'apparaîtra qu'en 1980, et bénéficiera cette même année de petites modifications comme une nouvelle planche de bord, un intérieur modernisé, et plus de confort,...

Outre la nouvelle R5, les autres vedettes du Salon sont les nouvelles R15 et R17, de superbes coupés présentés l'année précédente. Tout parait désormais sourire à Renault.

Mais le premier choc pétrolier de 1974 balaye l'idée du progrès continu. Pour éviter de revivre les faits de Mai 68, l'État décide de lâcher du lest. Les conditions sociales s'améliorent, les salaires augmentent, le tout au détriment du commerce extérieur et, en général, de la santé de l'économie du pays, grevée par des surcoûts de production.

Le chômage, l'inflation et la récession s'installent, et le budgets de la France n'est plus équilibré et ne le sera plus jamais sans l'aide de la dette. La fin d'une période.

Les restructurations industrielles, conséquence de la crise, entraînent une forte montée du chômage. Avec la montée du prix de l'essence, les constructeurs vont s'efforcer de produire des véhicules avec une consommation moindre, comme ce que nous vivons actuellement en 2008.

Ainsi, les petites voitures de faible cylindrée seront les modèles les plus vendus. De nouveaux slogans apparaissent dans les publicités, laissant apparaître un message phare : un faible appétit en carburant.

Outre l'automobile, des mesures gouvernementales sont prises: journée hebdomadaire sans voiture aux Pays-Bas, interdiction de publicité sur les produits pétroliers en France, vitesse limitée, introduction en 1976 de l'heure d'été, qui devait faire économiser 300 000 tonnes d'équivalent pétrole, fuel domestique rationné, chauffage baissé dans les locaux publics, et... augmentation de la vignette.

Recherche dans la voiture sobre

La crise pétrolière aurait pu être l'occasion de développer la voiture électrique, qui depuis le début du siècle a été handicapée par le volume de ses batteries. Mais, il n'est pas question d'arrêter la consommation du pétrole. Cela rapporte trop de revenus aux États grâce aux diverses taxes et la technologie des batteries n'est pas encore assez mature.

La recherche ira donc du coté de l'économie d'énergie. Ainsi, en 1980, les pouvoirs publics pressent les constructeurs pour développer des prototypes dont la conso moyenne ne dépasse pas les 3l/100 km. Deux ans plus tard, Renault présente la Vesta ( Véhicule Économe de Systèmes et Technologies Avancées).

Les objectifs de consommation sont atteint: 2,99 l/100 km. En 1982, on annonce même chez Renault que " la conception de ce prototype tient compte de la volonté d'en dériver un produit industrialisable en grande série dès 1990..." En 1987, l'entreprise dévoile le prototype Vesta 2 (ci-dessous) encore plus performant.

Ce véhicule effectuera la distance Paris-Bordeaux soit 501,4 km à la vitesse moyenne de 101 km/h, consommant 9 litres d'essence, ce qui nous fait une moyenne de 1.94 litres aux 100 km. Ce sera le record mondial de consommation sur route. Son moteur est un 3 cylindres de 27 ch. et son Cx s'élève seulement à 0.186! Bien, très bien même !

Mais où est le modèle de série ? Réponse: aux oubliettes. Le projet a été abandonné en cours de route, et "certaines innovations technologiques seront appliquées à l'ensemble de la gamme". De nos jours, on entend toujours ces phrases: "production en petite série d'un véhicule hybride". Mais, faute de moyens et de temps, les constructeurs préfèrent fabriquer des modèles plus rentables.

La production automobile se casse "la gueule"...

La production des grosses voitures est fortement ralentie, des usines sont fermées comme par exemple GM, qui aux USA, ferme 16 usines pendant une semaine et licencie 40 000 personnes. De son côté, Renault se contente de stopper les embauches.

C'est pendant cette période très compliquée, qu'Alpine, désormais officiellement rattachée à Renault dévoile son A310, une berline sportive de grosse cylindrée... peu économe en carburant.

Mais comment vendre des voitures sportives en pleine crise pétrolière ? L'A310 est arrivée au pire moment. Son succès était donc impossible. Cela "coulera" Alpine, qui se fera totalement racheter par Renault un peu plus tard.

Si les gros modèles n'ont plus la côté, les citadines cartonnent. En 1974, la R5 représente déjà 30% des ventes de la Régie. En quelques mois, elle va augmenter de 60% à tel point qu'il faut lui aménager ses propres chaînes à Sandouville et à Douai, pour répondre à la demande.

Les concurrents élargissent leur bas de gamme, ou industrialisent les motorisations Diesels à grande échelle, car elles bénéficiaient d'une fiscalité très clémente. La France devient ainsi le pays le plus "Diésélisé" au monde.

Après la fin de carrière de la R17, Renault la remplace par un autre coupé dès 1980, qui mise beaucoup sur le confort, une sorte de GT: la Fuego.

Les années noires de Renault

Les problèmes économiques touchant la France ne donne pas envie aux clients d'acheter de voitures, et cette baisse de vente, entraîne évidement une forte baisse des profits. Pour éviter cela, Renault mise sur la diversification des activités hors automobile, moins sensible à la conjoncture et capable de générer du cash-flow. En théorie...

Portée par le succès de la R5, l'entreprise poursuit sa politique d'expansion financée par des emprunts, tout en maintenant une politique sociale de pointe coûtant très cher. Renault se prépare à de très mauvaises années...

Renault se lance en Formule 1

Malgré les soucis économiques, Renault se relance dans la compétition afin de rajeunir son image et de démontrer ses capacités à innover, ainsi qu'à démontrer son haut niveau technologique. Renault a depuis toujours la passion de la compét'.

Les succès du début du siècle, de la 4CV après guerre, de la 40 CV de Louis Renault, de la Dauphine, de la R8 Gordini, des Alpines A110, et autres le montrent: quand Renault s'engage , c'est pour gagner ! Mais, désormais, Renault vise plus haut, poussé par Elf: la Formule 1. ( voir l'histoire des années Turbo en Formule 1)

Ainsi, dès 1975, le département Renault Sport est créé. Par manques de moyens, Renault cherche à innover à moindre coûts et c'est ainsi que née l'idée du moteur suralimenté, un brevet déposé par... Louis Renault.

Cette technologie de la suralimentation n'est pas encore présente en F1 mais Renault teste son idée au Mans dans un châssis Alpine et fort de données, Renault Sport décide de s'engager en Formule 1 dès 1977 où Renault aligne sa superbe S01, qui est une monoplace 100% Renault. Cette drôle de voiture jaune attire les regards et les railleries, à cause de son châssis, mais surtout à cause de son moteur. "The Yellow Teapot" comme disaient les Anglais.

En 1978, l'Alpine Renault A 442B Turbo de Didier Pironi et Jean Pierre Jaussaud remporte les 24 H du Mans. La technologie est validée. Il s'agit d'un moteur V6 issu de la... R30, collé à un Turbo.

En F1, lors de ses débuts, ce moteur fait rire -pas longtemps- mais pourtant il dispose d'une puissance équivalente au ...V8 3l atmosphérique Ford Cosworth. Mais, il se montre extrêmement nerveux et fragile...

La première victoire d'un moteur Turbo en F1 arrive malgré tout dès 1979 au grand prix de France à Dijon avec à son volant Jabouille. En 1980, le team aligne trois victoires. Il y en aura en tout 15 dont huit grâce à Prost, jusqu'en 1985.

Entre temps, les autres constructeurs ont emboîtés le pas à Renault, tandis que les déboires de la maison mère de ce dernier mettront un terme à ces activités très coûteuses au milieu des années 80.

Outre la Formule 1, Renault gagne aussi sur... deux roues. En effet, durant la période de crise, Renault prend de nombreuses actions dans les cycles Gitane ( Micmo Gitane). De sorte, Renault va s'illustrer dans les compétitions cyclistes de 1978 à 1985 avec sa propre équipe Renault-Gitane. Au palmarès de ces 7 années de gloire, on note 3 tours de France remportés par Bernard Hinault et un par Laurent Fignon, de même que deux titres de champion du monde cycliste en 1980 et 1983.

Première discipline de Renault, et aussi celle qui lui a permit de renaître après la guerre, Renault s'illustre également en rallye avec notamment Jean Ragnotti, pilote Renault par excellence, qui remporte entre autres, le rallye monte Carlo en 1981, le tour de Corse avec la R5 Turbo, et la dernière édition du Tour de France automobile au volant d'une R5 maxi Turbo. Avec la version 4X4 de ce modèle, il remporte également, avec Gérard Roussel, les 24 H sur glace.

La crise provoque des partenariats et des fusions entre constructeurs

Le mouvement de concentration amorcé dans l'entre deux guerre va se généraliser et augmenter à partir de 1973. Pour mieux résister aux secousses du marché, de grands groupes se créent comme la fusion Peugeot-Citroën (fusion-acquisition nationale), prise de participation ( Ford-Mazda), acquisition transnationale (Chrysler Europe est repris par PSA), etc.

Cela a pour but de réduire les coûts, de baisser les prix de revient, de bénéficier de la complémentarité des marchés des différentes marques, et de lancer de nouveaux produits.

Poursuivant une politique entamée de longue date, Renault développe ses accords avec d'autres constructeurs. L'alliance abandonnée avec Peugeot pour cause de mariage de ce dernier avec Citroën, continue au sein de la Française de mécanique, à laquelle s'est joint Volvo, pour l'étude et la fabrication d'un moteur V6 ( cela avait abouti en 1971 à la création d'une filiale, la Société franco-suédoise de moteurs).

En 1979, Renault et Volvo signent un accord de coopération industrielle pour la R&D des produits. Renault prend une participation de 10% dans Volvo Car Corporation. La Régie y renoncera en 1985 lors de mesures d'assainissements mises en oeuvre par G.Besse. De la même manière, un accord sera signé avec Volkswagen pour la conception et la production en commun d'une boite de vitesses automatique.

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