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4. Renault traverse la crise sans frémir (1929 - 1939)

Alors que la crise économique frappe de plein fouet l'Amérique, ses conséquences vont toucher très rapidement les pays industrialisés d'Europe, à cause du rapatriements des fonds que les USA avaient prêté après la guerre 14-18.
4. Renault traverse la crise sans frémir (1929 - 1939)
Par le 23/06/2002

Alors que la politique automobile européenne est à la fabrication de petites voitures d'entrée de gamme notamment en Grande Bretagne, les trois grands constructeurs français vont refuser d'un accord commun leurs projets de 5 CV.

Baisse des coûts chez Renault

En 1929, Renault n'a plus de gros investissements à faire. Il a une trésorerie solide, et une fabrication très diversifiée. Bien que la production est très touchée par la crise pendant 3 ans, Renault s'est adapté en faisant pression sur ses fournisseurs, en réduisant ses effectifs, et en baissant les salaires, qui ne remonteront que vers 1935.

Citroën ne se rend pas compte que la production s'est stabilisé et continue sa politique d'expansion, sans appui financier derrière. Pour rivaliser avec Billancourt, il reconstruit l'usine de Javel, ce qui s'avère très coûteux. Malgré le spectaculaire lancement de la "7" plus connue sous le nom de Traction, les pouvoirs publiques demandent à Renault, de reprendre son concurrent. Devant le refus de Renault, c'est Michelin qui s'en acceptera la proposition.

De l'automobile à l'aviation en passant par les autobus et camions

Après la première guerre mondiale, Renault continue avec succès sa conquête de l'air. Il participe ainsi à l'aventure de l'Aéropostale où de nombreux pilotes Français vont signer des exploits. L' Aéropostale est couverte de gloire mais la crise économique de 1929 la fait sombrer. Il ne reste plus que quelques compagnies en France dont Air Orient et Air Union qui ont Louis Renault comme administrateur.

Sous la pression de l'état, ces compagnies se regroupent et forment Air France en Août 1933 et rachètent l' Aéropostale. Louis Renault siège alors au conseil d'administration. Cette même année Pierre Cot, ministre de l'Air de l'époque fait appel à Louis Renault pour racheter la société Caudron.

Renault devient ainsi constructeur d'avion et en 1935, il entre comme principal actionnaire dans la création d'Air Bleu, le premier réseaux intérieur de transport postal.

Louis Renault n'en oublie pas pour autant ce qui roule, les automobiles bien sur, mais aussi les autobus, notamment avec le légendaire TN4 (puis TN6) qui est commercialisé dans les années 30 ou encore les poids-lourds et utilitaires.

Du côté des voitures, la glorieuse 40CV est stoppée en 1928 et remplacée en 1929 par une toute nouvelle 8 cylindres, la Reinastella, point de départ de la série des Stella qui durera jusqu'à la guerre: Reina, Mona, Viva, Nerva, etc.
Une nouvelle  8 cylindres est commercialisée en 1930, la Nervastella qui reprend la carrosserie de la Vivastella, mais avec un capot plus long.

La Primaquatre motorisée par le 4 cylindres de la 10CV débarque en 1931 pour assurer l'entrée de gamme et contrer ainsi Citroën avec ses C4.

Cette même année, l'ingénieur André Lefebvre entre chez Renault. Mais ses idées trop en avance sur son temps pour Renault, le poussent à quitter la firme de Billancourt pour aller chez Citroën dès février 1933 et concevoir la Traction. Renault présente également cette même année, la Nervahuit, une Nervastella plus économique dans sa présentation. Si pour la Mona et la Viva cela fonctionne, en revanche, les clients aisés de la Nervastella se montrent peu intéressés. La Nervahuit disparaîtra dès l'année suivante.

En 1932, une Monaquatre encore moins chère que la Primaquatre est commercialisée. Elle reprend la carrosserie de la Prima, mais se dote d'un moteur bien moins puissant d'une cylindrée de 1 3000 cm3 contre 2 100 cm3. Dans la gamme des 10CV, un nouveau modèle arrive, la Vivaquatre qui aura droit à ses versions sportives Viva Sport en 1934 et Viva Grand Sport en 1936 qui s'inspirent de l'avion Caudron-Renault Rafale détenteur du Record du Monde de l'Heure.

Renault présente la Celtaquatre en avril 1934, en même temps que la Traction. La Celtaquatre est très conservatrice dans ses choix techniques, tandis que la Traction est clairement en avance sur son temps. La petite Renault a cependant pour elle un prix de vente légèrement inférieur (16 900 F contre 17 700 F).

En 1936, Renault lance la construction de son  usine du Mans, la première à ne pas être proche de Paris.  Cette même année, Renault sort  46 300 voitures de ses usines, un record qui ne sera battu qu'après guerre. Les années suivantes seront plus compliquées avec les grandes grèves.

La dernière grande nouveauté de cette période est la Juvaquatre, présentée au Salon 1937 dont le style s'inspire de l'Opel Olympia.  La Juva est la première Renault  à roues indépendantes et coque autoporteuse, une solution technique adoptée par Peugeot au début des années 30, imité par Citroën dès 1934. Louis Renault attendra 1938, préférant proposer à ses clients des solutions les plus fiables possibles, contrairement à un André Citroën plus porté sur l'innovation au détriment, notamment sur la Traction, de la fiabilité.

Les "têtes pensantes" de Renault

Louis Renault, qui commence à ressentir les effets de son âge, pense à placer des hommes en qui il a entière confiance à la tête de son usine à la veille de la seconde guerre mondiale. "Patron Absolu", Louis Renault garde néanmoins la main sur la vie de son entreprise. Ce patron, qui n'aime pas les "têtes", pense qu'un vrai dirigeant d'entreprise doit avoir fait un parcours professionnel et non une grande école. Louis Renault, en est le parfait exemple.

Cependant, il s'entoure également de quelques hommes fort diplômés. Outre les fidèles des débuts comme Charles-Edmont Serre, Paul Hugé, Emile Duc, Léon Saives, Renault embauche après la première guerre mondiale, un dessinateur de chez Delage: Jean-Auguste.

Renault engage aussi en 1918 Samuel Guillelmon, puis les deux fils de ce dernier. Plus tard, Renault accueille des membres de sa famille: son beau frère, Roger Boullaire, et ses deux neveux par alliance Henry Lefèvre-Pontalis (qui décédera en 1933) et François Lehideux (agé de 26 ans). Alors qu'il aurait du prendre la relève de Louis, après une forte dispute avec son oncle, il sera remplacé par René de Peyrecave, autre personnage à l'histoire trouble pendant la seconde guerre mondiale.

Lehideux (au centre) rétablit le dialogue avec les ouvriers
François Lehideux au milieu des employés

L'Île Seguin, un espace vierge à construire

Alors que Louis Renault avait acheté ce site dans l'idée de créer un espace récréatif pour ses employés, il se rend compte que ses grands ateliers modernes de montage, c'est là qu'il doit les construire.

L'île Seguin, imaginée par Louis Renault en 1927, était la seule alternative pour s'adapter à un marché en crise mais néanmoins très concurrentiel.

L'île Seguin

L'installation de Renault sur l'île Seguin est la conséquence indirecte de la fascination qu'exercent Louis Renault, André Citroën et Henry Ford l'un sur l'autre. C'est en effet après la visite des usines de Détroit et la fascination devant la découverte de la technologie de la logistique américaine que Louis Renault décidera de se lancer dans ce pari fou qu'est la construction de sa nouvelle usine.

Pour ce faire, il décide malgré tout de faire appel aux banques. Mais devant le refus de celles-ci, il investit son propre argent dans la construction de sa nouvelle usine. Louis n'a alors qu'une idée: que son entreprise soit forte et indépendante.

Avec cette nouvelle usine, il veut moderniser ses méthodes de fabrication, baisser le coût des voitures, apporter des perfectionnements importants aux moteurs et aux carrosseries.

Ces différents objectifs ont en fait pour origine la dégradation des bénéfices sur la fabrication d'automobiles. Le pari sera finalement gagné, et il se dessine, à partir de 1935, un authentique modèle automobile français qui se caractérise par un travail à la chaîne associé à de nouveaux outils de gestion comme la planification ou les études de marché.

La construction de l'usine se déroule en deux étapes: une plate forme de 220m de large devant supporter les futures chaîne de montage a d'abord été établie au centre de l'île. L'assise est assurée par quelques milliers de pieux plantés à plus de 10m de profondeur.

4. Renault traverse la crise sans frémir (1929 - 1939) 0

Près de 56 000 m² ont ainsi pu être aménagés dès 1929. Puis, dans le prolongement du premier est venu s'ajouter un deuxième ensemble de 250 m de long sur 140m de large, soit une surface aménageable de près de 80 000m². Les travaux seront terminés en 1934.

A cela, il a fallu ajouter, même sans l'accord des autorités, toute une infrastructure pour relier l'île à la terre ferme: ponts, palées, raccords à la ligne de chemin de fer de Meudon sur la rive gauche de la Seine, ainsi que des installations pour l'accostage des bateaux, et enfin, une énorme centrale électrique sur la pointe aval. Une fois terminée, de très nombreux modèles sortiront de la nouvelle usine tels que des voitures pour particuliers, des autocars, des véhicules industriels, ainsi que des automotrices, remplacées par des chars B1 en 1939.

Le symbole massif d'une puissance industrielle qui avait fait de Renault "L'automobile de France" fermera cependant ses portes le 31 Mars 1992. Après n'avoir été plus qu'un vieux bâtiment désarmé hanté par les vieux souvenirs, le site est actuellement réhabilité après de nombreuses péripéties.

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