Le retour en F1 (2001-2003)
2001, une année pour tout mettre en place
Cette annonce est tout sauf une surprise. Suite à son retrait en 1997 après le sacre de l'écurie Williams-Renault et de son pilote J.Villeneuve, Renault avait déjà annoncé qu'il reviendrait, lorsqu'il serait en mesure de refaire le coup du moteur Turbo des années 70.
Comme en 1987, mais cette fois, pendant 4 ans, les équipes de Renault ont travaillé dans l'ombre. A Viry-Chatillon, siège de Renault Sport, les ingénieurs annoncent avoir trouvé une idée de moteur révolutionnaire. A l'opposé de la mode de l'époque qui est de concevoir des moteurs très compacts (V10 avec angle compris entre 72 et 90°), Renault veut au contraire proposer un moteur avec un centre de gravité très bas, et donc un V « très ouvert » afin d'optimiser le châssis.
En prime, l'opportunité de racheter le team Benetton qu'il connaît bien pour avoir collaboré avec lui de 1995 à 1997 se présente. L'occasion est trop belle !
Ainsi, après s'être contenté de fournir le moteur à des équipes concurrentes de 1998 à 2001 (Williams, Benetton, Arrows,...) comme le fera de nouveau Renault entre 2010 et 2016 lors de son retrait, le vrai retour de Renault est programmé pour 2002. Quant à 2001, ce sera l'année de transition sous le nom de Benetton-Renault, une sorte d'année de recherche qui s'annonce très compliquée pour les pilotes...
Et le moins que l'on puisse dire, c'est que même si c'était annoncé, les débuts furent délicats. Pour le premier grand prix de la saison à Melbourne, les Benetton sont reléguées en avant dernière ligne, juste devant les Minardi, mais derrière les Bar, Jordan, Jaguar, Prost et Arrows. Et que dire des écarts entre les premières places et celles de la Benetton-Renault... Idem pour la course, où la Benetton peine presque à supporter le rythme des très modestes Minardi, propulsées par un antique moteur Ford dépassé de 3 ans au moins.
Cette situation risible plonge le monde de la F1 dans un petit ricanement silencieux et un....."Ca ne marchera jamais...". Et ce n'est pas un point acquis quelques courses suivantes par un remarquable Fisichella qui allait faire changer d'avis. Le châssis n'est pas très bon, le moteur révolutionnaire, n'est ni puissant, ni fiable...
Pourtant, les progrès sont rapides et remarquables. Dès la mi-saison, les ricanements commencent à changer de camp, comme à l'époque du Turbo. Puis, la délivrance: G.Fisichella, toujours lui, monte sur le podium en Belgique après une très remarquable course, mélangeant attaque, sagesse et audace. Ce podium acquis à la régulière, en tenant à distance les McLaren signe là une vraie satisfaction.
Lors des dernières courses, les Benetton se qualifient même juste derrière les deux tops teams de l'époque que sont Ferrari et McLaren, c'est à dire en 3ème ligne. Cette progression qui fait passer de l'avant dernière ligne à la troisième n'est pas le fait du hasard. Renault possède un superbe pouvoir de réaction et de possibilité d'évolutions d'un moteur qui commence à peine sa vie.
2002, le vrai retour de Renault en F1!
A l'issue de cette année de mise au point, la nouvelle équipe se nomme désormais Renault F1 Team. Le jaune Renault est donc de mise pour cette nouvelle auto, associé au bleu du sponsor principal.
La Renault R202
Désormais, avec la triste disparition de l'écurie Prost, toute la France n'aura d'yeux que pour Renault. Et Renault a le budget, pour vivre, survivre, gagner et écraser la concurrence, contrairement à Prost qui n'a pas réussi à obtenir le soutien d'un grand motoriste.
Fisichella parti, un autre italien, moins expérimenté, prend place dans la voiture en la personne de Jarno Trulli dont le talent n'est plus à présenter. Jenson Button continue l'aventure commencée l'année précédente, tandis que Fernando Alonso, qui vient de réaliser une saison pleine chez Minardi, est nommé en pilote d'essais.
Dès l'intersaison, la Renault R202 se montre performante. Mais officiellement, Renault vise la quatrième place du championnat et ne veut pas se mettre la pression inutilement.
Frédéric DELARUE, chroniqueur chez F1-Live évoque la nouvelle aventure Renault d’une manière très sure : « la vérité doit être livrée, toute crue : Renault a du talent, un talent énorme. Une qualité séculaire que d’autres envient à juste raison. Sur la route ou sur les circuits, Renault a toujours eu et entretenu une petit coté visionnaire et futuriste qui a toujours payé. Hier un moteur turbo compressé puis la révolution du V10 et aujourd’hui un bloc à l’angle très ouvert et bourré de technologies dont le succès, s’il y en a, ne devra rien au hasard ou à la fatalité. Ajoutez à cela une grande capacité de travail, les compétences de tout le staff Renault, un budget confortable et une professionnalisme extrême, et vous obtenez la recette d’une équipe qui se donne tous les moyens de gagner".
Un départ en fanfare, mais pas de d'exploit pendant toute la saison
Lors du premier Grand Prix, après de bonnes qualifications, Trulli réussi un superbe départ et parvient à se placer en seconde position. Stupeur dans le paddock.
Mais, il glissera quelques tours plus tard sur une flaque d'huile, provenant d'une casse moteur d'un concurrent... Certes, il n'aurait très sûrement pas pu tenir cette place jusqu'à l'arrivée, mais cela permet au moins de montrer aux adversaires que Renault n'est pas là pour faire de la figuration, et que la quatrième place espérée en fin de saison n'est pas un vœux pieux.
Toute la saison durant, Jarno Trulli, mais surtout le britannique Jenson Button, permettent à Renault de marquer de nombreux points, en se plaçant très régulièrement aux quatrième, cinquième et sixièmes places. Petit regret cependant, jamais pendant toute la saison, le Team Renault ne signera "d'exploit" comme Fisichella l'avait fait avec l'ancienne Benetton. Au final, le Team Renault F1 rempli ses objectifs en décrochant une très belle 4ème place au championnat du monde, derrière Ferrari, Williams et McLaren, mais devant Sauber, Jordan, BAR-Honda, Jaguar. Renault progresse et cela se voit.
Caractéristiques de la monoplace Renault R202
Châssis: monocoque en fibre de carbone et en nid d'abeille aluminium.
Suspensions: triangles superposés à l'avant et à l'arrière.
Boîte de vitesses: automatique à six rapports.
Freins: disques et plaquettes Hitco en carbone, étriers AP Racing, gestion électronique du moteur par Magneti Marelli.
Tous les systèmes de contrôle de la boîte de vitesses (y compris l'antipatinage) sont développés par Renault F1.
Dimensions et poids:
Voie avant: 1 450mm
Voie arrière: 1 400mm
Empattement: 3 100mm
Longueur hors tout: 4 600mm
Hauteur hors tout: 950mm
Largeur hors tout: 1 800mm
Poids total: 600kg (avec pilote, caméra TV et lest)
2003: Renault se montre et signe sa première victoire depuis son retour
Un nouveau moteur RS23 étudié très en amont et mieux intégré au châssis
Les premières études, les grandes lignes générales du nouveau moteur RS23, sont lancées dès Août-Septembre 2001. Après beaucoup de travail en CAO, c'est la monté en puissance à partir de Janvier 2002. Une quinzaine de dessinateurs sont sur le projet, et six « ingénieurs-experts » responsables chacun d'une pièce du moteur sont à l'oeuvre.
En février-Mars 2002, alors que la saison de F1 va commencer, et que le RS22, l’aîné du futur RS23, va faire ses premiers rugissements, des outillages de montage sont lancés en fabrication. Ils seront assemblés en septembre avant le montage du moteur.
En Mars 2002, le lancement de la fabrication du RS23 est annoncé. En Juin 2002, l'usinage des pièces définitives pour des moteurs prototypes est lancé afin de pouvoir homologuer ces pièces. En Septembre 2002, les premières pièces sont reçues. Le "service contrôle" entre en action. Il s'assure que toutes les nouvelles pièces du moteur sont conformes à la demande, et analyse leur comportement après utilisation. Un plan qualité est alors défini avec les sous-traitants.
Vient alors le montage. Le service "Essai" participe aux ... essais du moteur pour définir des mesures spécifiques de température, et autres... Le programme de test peut alors être défini.
Dès Octobre 2002, le moteur tourne sur un banc d'organe qui entraîne les pièces en fonctionnement tel que la pompe à eau ou à huile, distribution, culasse,... Ce banc ne délivre pas de puissance mais permet la vérification de ces éléments « extérieurs »
Le grand jour arrive enfin le mardi 15 octobre. Le RS23 enfin assemblé, lâche au banc d'essai n°5 ses premiers rugissements 15 mois après les premiers traits de crayon! Le 26 novembre, le Renault Team F1 aligne à Valence sa première monoplace hybride: châssis, moteur et boîte de vitesses version 2003 sont affublés d'une carrosserie version 2002.
Concernant les modifications apportées, on note une bien meilleure intégration de l'ensemble au châssis.
« Nous avons beaucoup travaillé sur l'association du R23 avec la nouvelle boîte de vitesse et sur son intégration dans le châssis. Le bloc possède une construction inédite, sa rigidité est bien meilleure. Les commandes de soupapes sont également très différentes » confie Jean Jacque His, le directeur général de Renault F1 Team France.
Contrairement aux deux monoplaces précédentes, cette fois, l'équipe a eu le temps d'intégrer correctement son moteur si particulier dans le châssis du fait de son angle très ouvert à 111° permettant de rendre la voiture plus agile grâce à un centre de gravité très bas, seule condition que pour l'apport de ce moteur révolutionnaire soit parfaite.
La présentation de la nouvelle bête est prévue le 23 janvier sur le circuit du castellet. Elle change de dénomination, et au lieu de s'appeler R203 (pour faire suite à la R202), elle se nommera R23 et le moteur RS23.
Fernando Alonso remplace Jenson Button, les Renault performantes dès le début de saison
Du côté des pilotes, sans surprise, Fernando Alonso dont le manager n'est autre Flavio Briatore, le directeur d'équipe, remplace Jenson Button.
La voiture se montre très compétitive dès le début de saison. Après avoir placé ses deux voitures dans le top 6, l'équipe s'empare de la première ligne après les qualifications de la seconde manche. Alonso terminera sur le podium à l'issue de la course.
A Barcelonne, Alonso dispute la victoire jusqu'au bout tandis qu'au Canada, la Renault d'Alonso obtient le meilleur tour en course. La délivrance arrive en Hongrie, où après la pôle position, Alonso signe la première victoire de Renault depuis sont retour.
Renault termine la saison à une nouvelle 4ème place avec 1 victoire, deux pôles et 1 meilleur tour en course.
Après cette nette montée en puissance, l'objectif pour l'année 2004 est se battre plus souvent aux avants-postes avant de viser le titre. L'équipe parviendra à obtenir une belle victoire à Monaco grâce à Trulli. Le titre sera pour 2005.